Firefox veut réveiller la Vallée (et le monde)

Posté le 15 Avr, 2013

En pleine affaire “AppGratis versus les censeurs d’Apple”, Mozilla révise la grammaire du web, même mobile. Firefox, libérateur d’une Silicon Valley retombée amoureuse du grand méchant Compuserve?

Début avril, le projet Mozilla célébrait un anniversaire, celui des 15 ans de la livraison du code-source de Netscape  – ancienne gloire déchue des navigateurs Internet -. Une communauté allait donner naissance à Mozilla 1.0 quatre années plus tard. A l’époque, neuf ordinateurs sur dix dans le monde utilisaient Internet Explorer.

En 2003, la Fondation Mozilla est créée, organisme sans but lucratif. Son projet le plus connu et emblématique, Firefox 1.0, sera publié en 2004. En moins de douze mois, le butineur sera téléchargé plus de 100 millions de fois. En 2008, il représente déjà 20% du “marché”.

 

“Not every venture is about capital”*: c’est sous cette bannière que la Fondation Mozilla se démarque aujourd’hui, plus que jamais, de ses contemporains dans la Silicon Valley. Peu le savent, mais le quartier général de la Fondation est situé à Mountain View, à quelques “blocks” de celui de Google. D’autres bureaux ont été ouverts, non loin de là, à San Francisco, sur Harrison Street, à deux pas du Bay Bridge.
De l’autre côté de l’Atlantique, son pendant européen, incarné par l’infatigable Tristan Nitot, disposera désormais de bureaux bien plus spacieux et prestigieux. Son siège est situé à l’Hôtel de Mercy-Argenteau, comme le rapportaient en images le 4 avril nos confrères du Journal du Net.

Et le recrutement ne faiblit pas: “Nous avons plusieurs dizaines de recrutements en cours, notamment pour l’équipe de développement de Firefox OS”, confiait alors au Journal du Net le Président et Fondateur de Mozilla Europe.

Le mobile, son prochain “chapitre”

Ce 11 avril, des changements ont été opérés auprès de l’équipe de direction. Gary Kovacs se retire du poste de CEO (qu’il occupait depuis 2010) et sera remplacé dans le courant de l’année (la recherche active est en cours urbi et orbi). Objectif? la mobilité!

Outre le navigateur de bureau (celui que vous utilisez sur n’importe quel ordinateur Windows, Mac OSX ou Linux), Mozilla a développé Firefox pour Android (sur smartphone et sur tablette), puis a lancé début 2013 les fondations de FirefoxOS, un système d’exploitation 100% web/HTML5, destiné non pas à concurrencer de manière frontale les ténors du secteur (Android, iOS, Windows Phone et BlackBerry 10), mais à offrir une alternative aux systèmes et app stores actuels en plaçant l'”Internet libre” au coeur des technologies mobiles.

Destiné dans un premier temps à l’entrée de gamme et aux marchés émergents, Firefox OS entend “abattre les murs entre les applications et le Web, car les applications Firefox OS sont conçues en utilisant les technologies Web, comme le HTML5”, comme le confiait au Mobile World Congress de Barcelone en début d’année Jay Sullivan, VP des produits Mozilla.

Pour mener à bien cette tâche stratégique, Li Gong est nommée, a-t-on appris ce 11 avril, “Senior Vice President des appareils mobiles”. Il sera en charge de l’avancement de Firefox OS. En plus de ses nouvelles attributions, cet asiatique conservera sa place de CEO des filiales en Chine et à Taiwan. Ce n’est pas un inconnu dans la Baie ; il a participé à la fondation et à l’investissement de nombreuses jeunes pousses en Chine et dans la Silicon Valley.

La défense d’un web ouvert

L’ère d’AOL, Compuserve et Infonie – éphémère succès en France et en Belgique aux débuts des modems 28.8k – avait été laminée par le navigateur web. Aujourd’hui, constate la Fondation, le web s’encapsule dans des applications bien souvent non interopérables d’un système mobile à l’autre. Une lutte dont FirefoxOS se veut le porte-étendard, mettant en avant la nécessité d’un Internet mobile libre, standardisé et décentralisé.

A ce combat, il faut ajouter une politique de diffusion des applications et des contenus de plus en plus opaque, doublée d’une pudibonderie toute américaine, que Mozilla entend également dénoncer.

Un exemple parmi d’autres de cette main de fer? L’entreprise française App Gratis distribuait jusqu’il y a peu sur iPhone et iPad des applications gratuites, en collaboration avec des éditeurs désireux de s’offrir un brin de promotion parmi les millions d’applis mobiles présentes sur l’App Store. Un trublion gênant pour le business model d’Apple, selon Simon Dawlat, interrogé le 11 avril par Stéphane Soumier sur BFM Business. Loin d’être une mésaventure isolée, l‘affaire est prise très au sérieux par les autorités françaises et a pris une tournure politique (Source: Le Figaro), avec l’intervention symbolique de Fleur Pellerin, ministre déléguée aux PME, évoquant des problèmes de fond sur “la liberté de choix des consommateurs”. Elle plaide en faveur d’une autorité de régulation de ces app stores, sorte d’ONU des continents virtuels.

Autre conflit généré par la main de fer qu’Apple  exerce sur les contenus disponibles sur ses terminaux? L’obligation de procéder à la suppression/censure de près de 3.000 bandes dessinées d’Izneo (Source: 01Net), considérées comme “pornographiques”. Parmi elles, citons Largo Winch, XIII, Blake et Mortimer. Google et Amazon ne montrent guère plus d’enthousiasme à casser les codes des normes américaines en matière de culture et de divertissement.

En réponse à ce différend culturel et à la constante modification – unilatérale – des règle propres aux différents App Stores, Mozilla s’avance en “défenseur du Web” ouvert et libre, estimant que chaque développeur de site web est un développeur mobile en puissance. En février, Serge Mansilla écrivait sur son blog personnel un plaidoyer à la gloire de FirefoxOS, traduit en français par l’équipe du Framablog.

“En utilisant des technologies flexibles et populaires comme HTML5, CSS3 et javascript, Firefox OS a promu instantanément des millions de développeurs web et javascript en développeurs d’applications. Tout ce qu’ils ont à faire est de télécharger un module complémentaire de simulation gratuit (et ce n’est même pas nécessaire si votre application n’utilise pas les API des téléphones). Les développeurs connaissent déjà l’environnement du navigateur et ses outils, et il ne leur est pas nécessaire d’apprendre un nouveau langage ou une nouvelle architecture.”

Là où Chrome vous invite à introduire votre compte Google lors de la première utilisation du navigateur – sur mobile, tablette comme sur ordinateur -, Firefox vous rappelle vos droits. Une attitude constante  pour la Fondation, qui entend rester “à l’intersection du libre et des standards du Web”.

“On ne cherche pas à enfermer les gens, on n’est pas dans une logique de maximisation du profit, de revenus immédiats étant donné que nous sommes une association à but non lucratif”, déclarait à ZDNet Tristan NITOT le 28 février. “Notre but, c’est faire du Web la plate-forme mobile par excellence et nous pensons que tout le monde va se rallier à cette vision. ”

* toute entreprise n’est pas forcément capitaliste

Écrit par Cedric Godart

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